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Alors qu’on associe généralement la peur à des réflexes tels que la fuite, l’inhibition ou la démobilisation lorsqu’il est question de militantisme, cet article examine comment cette émotion peut parfois stimuler l’engagement de militantes féministes. Située au croisement des approches « actionnistes » (Bernard, 2017) des émotions, de la sociologie des mouvements sociaux et de la sociologie féministe, la discussion proposée s’inspire de 87 entretiens semi-dirigés réalisés entre 2006 et 2015 à travers le Québec, et d’une comparaison entre les milieux féministes suisses romands et québécois grâce aux 31 entretiens réalisés en 2018 et 2019 dans ces deux régions. En tenant compte des niveaux macro, méso et micro de l’analyse, l’article interroge les effets contrastés de la peur sur l’engagement féministe selon le positionnement des actrices dans les rapports sociaux de race, de classe et de sexualité, mais aussi selon les origines de la peur (intra ou extra mouvement), son degré d’intensité, ses interactions avec d’autres émotions (dont la colère) et le travail émotionnel (Hochschild, 2012) des féministes interrogées. L’article brosse ainsi un portrait des causes de la peur chez les féministes pour ensuite analyser les séquences émotionnelles les plus récurrentes en vue de mettre en relief diverses combinaisons émotionnelles et leurs effets sur l’engagement des féministes.
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Le premier tome de la trilogie autobiographique de Jovette Marchessault, Le crachat solaire, raconte le voyage cosmique de la narratrice vers la terre, sa naissance, ainsi que ses voyages dans le ventre d’un autobus Greyhound à travers les Amériques à l’âge adulte qui la met en lien avec « la terre amérindienne ». Après un long périple, elle sent le besoin de revenir à Montréal, un récit de retour qui rejoint celui de sa chute sur terre dans l’enveloppe charnelle de son corps physique. Les deux récits qui s’entrecroisent offrent une vision alternative de l’histoire à travers un récit de soi, de sa famille, de ses ancêtres et d’un récit de création féministe. Unique, ce texte féministe paru en 1975 articule la domination patriarcale à la violence du colonialisme dans un effort d’offrir une version féministe et anticoloniale de l’histoire de Montréal, du Québec, et plus largement des Amériques. À partir de ma position comme féministe colonisatrice blanche, j’analyse comment le récit autobiographique de Marchessault pousse à une prise de conscience anticoloniale pour les féministes québécoises et encourage un regard critique sur l’histoire du colonialisme au Québec.
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Dans cet article fondateur, K. Crenshaw introduit le concept d’« intersectionnalité », pour penser le caractère composé des effets de subordination liés à des facteurs comme la race, le genre, l’âge, la sexualité, etc. Elle analyse d’abord trois affaires juridiques qui ont traité des questions de discrimination raciale et sexuelle pour montrer les limites des « analyses à enjeu unique » : DeGraffenreid v. General Motors, Moore v. Hughes Helicopter, Inc. et Payne v. Travenol. Dans aucune de ces affaires, les tribunaux n’ont permis aux plaignantes d’alléguer une discrimination fondée à la fois sur la race et le sexe. K. Crenshaw montre qu’il faut penser l’intersectionnalité des discriminations pour saisir et corriger la situation particulière des femmes noires. Dans un second temps, elle élargit la réflexion vers le cadre sociopolitique et suggère que la condition des femmes noires doit être mieux prise en compte tant par les mouvements féministes que par les mouvements anti-racistes.
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The current study explored sexual minority women’s gender aesthetic and style by using van Anders’ (2015) sexual configurations theory (SCT), which allows for nuance in the measurement of gender/sex research. Previous research on sexual minority women has suggested a markedly masculine “Lesbian Aesthetic” (Huxley et al., 2014) and has connected aesthetic expression to internalized homophobia and levels of outness such that sexual minority women categorized as more feminine report higher rates of internalized homophobia and identity concealment. However, the bulk of past research used dichotomous measures of assessing gender and predated an ostensible shift in LGBTQ+ identities. To update this body of research, the current study explored gender aesthetics by asking sexual minority women to map their gender expression using SCT diagrams and complete measures of outness and internalized homophobia. We found no significant group differences in internalized homophobia or outness for femme, butch, and androgynous participants. Content analyses of gender diagrams suggest that the gender aesthetics of sexual minority women are neither monolithic nor masculine but may be beginning to lean towards the feminine and most certainly encompass a complex and diverse range of expressions
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Un article de la revue Études littéraires africaines, diffusée par la plateforme Érudit.
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FéminÉtudes est une revue étudiante, féministe et multidisciplinaire. La revue est née en 1995 de l’initiative d’étudiantes féministes dans l’intérêt de partager leurs recherches et de créer un groupe affinitaire. La revue est dirigée par des collectifs de rédaction bénévoles et autogérés, et soutenue par l’Institut de Recherches en Études Féministes (IREF) de l’Université du Québec à Montréal. Au fil des ans, FéminÉtudes a réussi à se bâtir une réputation et une légitimité dans le champ de la recherche en études féministes, tout en offrant une tribune au travaux et aux réflexions de dizaines d’étudiant.e.s. Au-delà de la recherche, c’est également pour l’avancement des luttes féministes que FéminÉtudes souhaite continuer à grandir.
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Cet article a pour objectif d’évaluer la portée descriptive de la notion de « triangle de velours » pour comprendre la réussite de certaines collaborations féministes avec l’État québécois. La notion de triangle de velours a été élaborée par Alison Woodward en 2003 avec la volonté de rendre compte des alliances établies entre les féministes de la base, les expertes universitaires et les féministes dans les appareils d’État afin d’incorporer les luttes pour l’égalité dans les politiques publiques. Cette notion sera mise à profit dans le contexte québécois pour rendre compte de la complexité et de l’étendue des alliances parmi les féministes dans cadre des luttes pour la liberté d’avortement et l’équité salariale. Les matériaux principaux de notre analyse sont des entretiens semi-dirigés portant sur les récits de féministes militantes engagées dans ces luttes au Québec.
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Rita Mae Brown’s Rubyfruit Jungle (1973) is a foundational work of lesbian literature and has been characterized as a queer text. This essay begins with resistance to reading the novel as a wholly celebratory queer text because of how it positions a form of essentialized lesbianism against queer sexualities that are coded as deviant and abnormal. Nonetheless, Rubyfruit Jungle brims with queer narratives, queer scenes, and queer characters. In the essay’s second half, I draw on Eve Kosofsky Sedgwick’s model of reparative reading to engage with potential queer readings the novel affords. I show how readers can recuperate the queer sexualities the novel documents in ways that the novel – with its specific historical and political positionality – did not or could not account for.
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Djamila Ribeiro, journaliste, écrivaine et militante, est considérée comme une porte-parole du féminisme noir brésilien contemporain. Elle s’inscrit dans des mobilisations féministes croissantes qui, numériques ou non, suscitent l’intérêt des médias. Par son activité littéraire et éditoriale et sa présence sur les réseaux sociaux et dans les médias, l’auteure contribue à diffuser, voire à vulgariser, les savoirs noirs et postcoloniaux. La lecture de ses ouvrages, et notamment de Lugar de Fala (2017), essai traduit en France sous le titre La Place de la parole noire, révèle un ensemble de références intellectuelles qui ne sont pas circonscrites aux auteur·e·s brésilien·ne·s, mais incluent des textes fondateurs de la pensée féministe noire, états-unienne et globale. L’analyse des modèles théoriques de Djamila Ribeiro, ainsi que de la réception et de la circulation de ses ouvrages, permet de comprendre la posture intellectuelle et militante de cette figure marquante de la troisième vague féministe au Brésil.
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Nation-wide opinion polls and social scientific studies indicate that evaluations of gay men and lesbian women have become increasingly favourable. These positive trends do not explain the widespread discrimination experiences being reported. To assist researchers in investigating attitudes towards gay and lesbian persons, the current research examines whether there are multiple “types” that are identifiable and salient. Two Canadian studies (Ns = 67 and 206) were conducted to establish the presence of gay and lesbian subgroups. Using subgroups generated by Study 1 participants, community and student sub-samples selected those they perceive to exist. Results indicated that, for gay men, the subgroups Drag Queen and Flamboyant emerged, as did Butch for lesbian women. Amongst students, Closeted and Feminine also emerged for gay men, as well as Feminist and Tomboy for lesbian women. These findings have implications for contemporary research on gay- and lesbian-related attitudes and the methodology used to assess them.
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Recueil hétéroclite d’articles et de chroniques de nature autobiographique, littéraire ou politique, Bad Feminist (2014) donne à lire les questionnements identitaires d’une jeune Américaine née de parents immigrés haïtiens. Universitaire, essayiste et auteure de fiction, Roxane Gay évoque la difficulté à se définir et, plus tard, à prendre position en tant que femme de couleur dans une Amérique où cette identité reste problématique. Elle interroge les représentations des femmes dans la littérature romanesque contemporaine et analyse la place des personnes de couleur dans les créations télévisuelles. Elle examine également, sous l’angle psychologique et mythologique, le désarroi des green girls qui se prêtent au jeu de la télé-réalité. Loin de tout sectarisme, Roxane Gay s’appuie sur des références diverses, y compris sur les icônes du mouvement féministe, pour composer sa propre version, imparfaite dit-elle, mais assumée, du féminisme.
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Poétesse guerrière, Audre Lorde (1934-1992) s’auto-définit comme « Noire, lesbienne, féministe, mère, amante, poète ». Cet essai synthétise l’intervention politique féministe noire de l’écrivaine comme une pensée des différences et esquisse les contours de son héritage militant radical et lesbien. Promoteurs avant l’heure de la notion d’intersectionnalité, ses discours mobilisateurs exhortent à l’action. Lorde interroge le racisme des féministes blanches, pousse les femmes à forger leurs propres concepts, à dialoguer pour comprendre leurs différences. Elle réhabilite les émotions (la colère, la peur) et la force de l’érotisme. Mobilisatrice des féministes afro-allemandes, Lorde s’est engagée contre l’apartheid. De nombreuses organisations se placent résolument dans son sillage. On note son influence chez les poétesses noires américaines contemporaines, comme Claudia Rankine, alors que son apport théorique majeur, entre pensée radicale et théorie queer, réside dans l’affirmation de soi (empowerment), concept développé par Patricia Hill Collins, et le renforcement des coalitions.
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L’ouvrage de Joan Morgan, When Chicken Heads Come Home to Roost (1999), a fait date dans la réflexion sur le hip-hop d’un point de vue féministe, au point de cristalliser autour de lui les promesses et paradoxes propres à l’expression de « féminisme hip-hop ». En adoptant un double point de vue à la fois rétrospectif et spéculatif, cet article vise à replacer l’ouvrage de Morgan dans son contexte de parution tout en s’interrogeant sur les portes qu’il nous ouvre pour une réflexion ultérieure. L’émergence ici d’une voix présentée comme générationnelle, qui poursuit tout en les reformulant les revendications des « mères » africaines américaines des seventies, mérite d’être analysée dans sa spécificité états-unienne ; mais nous voyons aussi ce que nous pouvons tirer d’une lecture plus exploratoire de cet essai, ce qui nous mène à envisager avec Morgan le rôle possible de la culture dite « urbaine » comme contrepoint heuristique salvateur à la partialité élitiste qui menace le champ intellectuel.