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Note sur la traduction : Considéré comme le premier journal anarcha-féministe d’Amérique du Sud, La Voz de la Mujer paraît à Buenos Aires en 1896-1897 : il s’agit d’une publication semi-clandestine en raison du plaidoyer pour l’action directe qu’elle contient. Les rédactrices y critiquent de manière véhémente la religion, la société capitaliste et les inégalités entre hommes et femmes, d’où la devise « Ni dieu, ni patron, ni mari ». Nous reproduisons ici les éditoriaux des numéros 1, 2, 3, 4, 5 et 7 – le numéro 6 n’étant plus accessible. À plusieurs moments, nous avons fait le choix de l’écriture inclusive. Bien que volontairement anachronique, ce choix permet de souligner les intentions féministes des rédactrices et leurs idées novatrices concernant la maternité, le mariage et l’amour libre, et leur dénonciation du sexisme des militants anarchistes. La traduction cherche également à adapter certaines formules orales au contexte québécois du 21e siècle.
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Traduction d'un extrait pièce Los empeños de una casa, de Sœur Juana Inés de la Cruz (1651-1695) ,une religieuse catholique mexicaine. Poète et dramaturge, elle est aussi compositrice et mathématicienne et est aujourd’hui célébrée comme l’une des premières féministes des Amériques. PRÉFIX Les tâches ménagères, extrait |
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Même si la misogynie et les agressions sexuelles sont des problèmes bien connus et depuis longtemps dénoncés par des féministes militant dans les réseaux de gauche et d’extrême-gauche, les textes d’analyse sur l’antiféminisme de gauche restent relativement rares dans la vaste production d’études sur l’antiféminisme en général
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L’article traduit ici en français s’inscrit précisément dans cette démarche d’interpellation critique des féministes non-palestiniennes, y compris juives et racisées. Le titre « Justice is indivisible » reprend une déclaration de Martin Luther King Jr., et le sous-titre, « Palestine as a feminist issue », est inspiré d’un texte d’Angela Davis. Le texte est paru en 2017 dans un numéro spécial intitulé « Palestine Lives » de la revue aujourd’hui en dormance, Declonization : Indigenity, Education & Society, qui proposait aussi des articles comparant l’apartheid sud-africain et israélien (Leigh-Ann Naidoo) ou le colonialisme de peuplement aux États-Unis et en Israël (Johanna Fernandez). La traduction de ce texte est une initiative du Chantier sur l’antiféminisme du Réseau québécois en études féministes (RéQEF). En termes politiques, il y a alors une dizaine d’années que la bande de Gaza, minuscule territoire où s’entasse une population pauvre, y compris dans des camps de réfugié·es, est sous le contrôle du Hamas. Cette force politique islamiste en a expulsé de manière plutôt brutale le parti laïque du Fatha, du président palestinien Mahmoud Abbas qui contrôle encore aujourd’hui la Cisjordanie, menacée par les attaques de colons. En Occident, le Hamas est souvent diabolisé par la majorité comme l’équivalent palestinien de l’État islamique en Irak et en Syrie ou des talibans afghans, une force autoritaire, voire totalitaire, réactionnaire et patriarcale. Rappelons pour mémoire que bien des féministes aux États-Unis ont appuyé l’invasion militaire de l’Afghanistan par la coalition menée par les États-Unis, en 2001, tant elles espéraient voir les talibans vaincus, pour libérer les Afghanes. Pour leur part, bien des Afghanes rappelaient que leur problème principal restait la désolation que leur apportaient la guerre et la violence de l’occupation militaire occidentale, des propos qui font échos à ceux de Nada Elia au sujet de la Palestine écrasée par l’armée israélienne. Ce texte est aussi une réaction à la période 2015-2016, marquée par un regain de tensions meurtrières entre Israël et la Palestine, y compris quelques attaques aux couteaux menées par des Palestiniens à Jérusalem, qui ont attirées l’attention sur la scène internationale. En termes de rapports de force et de capacités de lutte, ces attaques aux couteaux doivent pourtant être comparées à la puissance de feu de l’armée israélienne, et même de colons, qui provoque évidemment bien plus de morts et blessés du côté palestinien qu’Israélien. L’armée israélienne, par exemple, compte 10 fois plus de chars d’assaut que l’armée française et 20 fois plus que l’armée canadienne. Le Hamas n’a pas de chars d’assaut… La publication de cette version française a été en grande partie motivée par la turbulence provoquée par l’offensive des troupes du Hamas lancée le 7 octobre qui a provoqué plus de 1 000 victimes du côté israélien, et surtout la réplique israélienne qui, à ce jour, a provoqué plus de 30 000 victimes du côté de Gaza, ainsi qu’un déplacement de plus de la moitié de la population et la destruction d’une ampleur inégalée, y compris d’hôpitaux, d’universités, d’écoles et de bibliothèques (sans parler des morts qui s’accumulent aussi en Cisjordanie). Cette violence à grande échelle a provoqué des ondes de choc dans les réseaux universitaires, y compris féministes, en Amérique du Nord et en Europe, alors que des voix (pro)palestiniennes ont été muselées par les directions d’établissement (voir, à ce sujet, Francis Dupuis-Déri, « Où sont les défenseurs de la liberté universitaire ? », Le Devoir, 25 janvier 2024). Même si le texte de Nada Elia est plutôt pessimisme à ce sujet, et traduit un terrible isolement politique, notons que quelques féministes juives se mobilisent aujourd’hui contre le génocide, dont la célèbre Judith Butler, qui réclame publiquement un cessez-le-feu, le droit de retour pour la population palestinienne et le démantèlement des structures coloniales, ainsi que Rosalind Pollack Petchesky, 81 ans, qui avait étudié l’antiféminisme et la nouvelle droit dans les années 1980, qui a codirigé en 2021 avec Esther Farmer et Sarah Sills l’ouvrage A Land With A People : Palestinians and Jews Confront Zionism et qui a été récemment arrêtée à deux reprises à New York dans des mobilisations du groupe Jewish Voice for Peace contre le gouvernement israélien et l’appui qui lui offre le gouvernement des États-Unis. Pendant ce temps, le Palestinian Feminist Collective appelle pour le 8 mars à participer à la campagne Third World Women Resist, à Chicago, Détroit, Los Angeles et San Francisco, déclarant qu’on « constate que des “féministes” sionistes, colonialistes et impérialistes s’approprient le vocabulaire des droits des femmes pour discréditer la lutte de libération palestinienne » et qu’« il n’y a pas de place pour des génocidaires et leurs alliées dans des mouvements féministes anti-impérialistes et décoloniaux. »
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Note sur la traduction : L’autrice britannique George Eliot (1819-1880), née Mary Ann Evans, est une intellectuelle et romancière qui a marqué la littérature victorienne. Ses romans, parmi lesquels on retrouve The Mill on the Floss (1860), Silas Marner (1861) et Middlemarch (1871- 72), ont connu un grand succès de son vivant. L’existence d’Eliot est frappée par l’ambivalence : si, dans ses écrits et ses romans, elle défend les valeurs chrétiennes de la bonne société britannique, elle mène une vie à leur encontre, entretenant des relations illicites et vivant la plus grande partie de sa vie avec George Lewes, un homme marié. D’ailleurs, malgré leur vertu, ses héroïnes sont bien souvent en porte-à-faux avec leur milieu social. Avant de pratiquer la fiction, elle a traduit des traités philosophiques tels quel L’Éthique de Spinoza et contribué à des publications intellectuelles comme la Westminster Review, où elle fait paraitre en 1856 l’essai cidessous traduit, « Silly Novels by Lady Novelists ». Dans une description satirique où elle recense les différentes espèces de « romans idiots de dames romancières » qui pullulent en librairie, Eliot critique en filigrane les marges étroites laissées aux héroïnes, érigées en irréalistes figures de l’idéal féminin. Elle reproche aussi aux critiques littéraires d’encenser l’idiotie au profit de l’intelligence, exposant le double standard auquel sont exposées les productions littéraires féminines
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Initié sous l’égide de l’Institut de recherches et d’études féministes de l’Université du Québec à Montréal (IREF-UQAM), le projet Pour une diversification des voix féministes dans l’enseignement francophone: traduction de textes théoriques à des fins pédagogiques cherche à rendre disponible à la communauté universitaire francophone des textes théoriques en provenance des études féministes, queers et décoloniales. L’objectif est de valoriser la diffusion de textes encore peu lus et étudiés dans la recherche en langue française, ainsi que de promouvoir des écrits de personnes historiquement marginalisées qui ne sont toujours pas disponibles en français. Soucieuses d’accroître la diversité et l’inclusion des voix minorisées dans la recherche féministe francophone, les membres de l’équipe souhaitent faire traduire des textes fondateurs issus des marges. Ce projet est actuellement mené par des chercheuses cisgenres eurodescendantes qui désirent se positionner en alliées et faciliter le partage d’expériences et de sensibilités différentes des leurs. En cohérence avec cette démarche, toutes les étapes de production des textes se veulent les plus inclusives possibles, dans le but de mettre en place un vivier d’échange, de transfert et de collaboration entre traducteurices, réviseur∙es et lecteurices sensibles issu·es d’une diversité d’expériences (de sexe, de genre, de race, etc.). Par ailleurs, la « Note sur la traduction » qui accompagne chacun des textes témoigne en toute transparence du processus de production des textes et détaille les choix posés par l’équipe. ISSN 2818-0704
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Note sur la traduction: En 1831, la militante et conférencière afro-américaine Maria Stewart publie le pamphlet « Religion and the Pure Principles of Morality » dans le journal abolitionniste The Liberator. Elle y promeut l’autodétermination et le droit à l’éducation des personnes afro-américaines. Ses idées féministes et abolitionnistes ne font aucun doute : elle invite sa communauté à se lever et à lutter pour sa dignité. Fervente chrétienne, Stewart intègre également dans son texte une série de références à l’Ancien Testament. De nombreuses recherches conjointes dans la Bible du Roi Jacques (aussi appelée King James Version [1611]) et dans la traduction de Louis Segond (1880) ont ici été menées afin de restituer au mieux ces emprunts. De plus, outre une occurrence du terme « homme », employé au début du texte comme synonyme d’« humain » afin d’en illustrer le caractère exclusif, nous avons fait le choix de l’écriture inclusive. Bien que volontairement anachronique, ce choix permet de souligner les intentions féministes de Stewart et son engagement pour celles qu’elle nommait « les filles d’Afrique »
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En 1893, la journaliste afroaméricaine Ida B. Wells fait paraître un volume intitulé The Reason Why the Colored American is not in the World’s Columbian Exposition, autopublié par l’autrice et agrémenté d’une introduction de la main du militant antiesclavagiste Frederick Douglas, ainsi que d’un chapitre conclusif rédigé par F. L. Barnett. Après avoir commenté la constitution des Noirs comme une classe dominée, et relevé la manière dont l’esclavage s’est renouvelé après la guerre civile américaine à travers le travail forcé des prisonniers, Wells s’attaque à la question de la justice populaire raciste des lynchages avec « La loi de Lynch ».
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Ferdulis Zita Odome Angone commente deux chapitres de la thèse soutenue en 2022 par Patricia Picazo Sanz et intitulée Modelos de mundo y discursos literarios saboteadores en Guinea Ecuatorial : la construcción de una identidad decolonial y sus límites [Modèles-monde et discours littéraires saboteurs en Guinée Equatoriale : la construction d’une identité décoloniale et ses limites]. Elle se concentre sur l’écriture et la réception d’un roman écrit en langue fang, pour souligner les relations entre identités subalternes et « discours saboteurs ».
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Dans le champ littéraire, la traduction est depuis toujours partout présente, mais régulièrement invisibilisée. Or, les œuvres traduites sont, lors de leur annexion à la langue-culture d'accueil, appelées à s'insérer dans ce nouveau champ littéraire, ce qui signifie fréquemment - et c'est notamment le cas dans la littérature française - que leur propos et leur forme doivent changer pour répondre à un nouvel horizon d'attente. Phénomène culturel complexe, la traduction littéraire relève de plusieurs facteurs, du climat politique à la normativité linguistique, en passant par l'état du champ littéraire d'accueil et les états d'âme des différents sujets impliqués, toutes ces forces se conjuguant pour tirer l' œuvre vers une lecture ou l'autre. L'exemple des romans de Jane Austen est parlant : autrice des plus respectées en Grande Bretagne, où son style unique l'a hissée au panthéon des écrivains, elle est souvent classée en France parmi les auteurs de romans à l'eau de rose. Ce sont les modalités sociohisroriques et littéraires de cette chute positionnelle qui constitueront le cœur de la présente thèse. Cette translation, qui fait passer Austen du sérieux au banal, n'est certainement pas sans rapport avec l'engagement protoféministe de l'autrice : en effet, à travers tous ses romans, elle met à mal le système patriarcal en dénonçant - subtilement et avec ironie - les conséquences, pour les femmes, de la mécanique du mariage et de la transmission patrimoniale des biens. Les traces de cette prise de position auront-elles disparu dans les traductions françaises? Je m'intéresserai donc, dans la présente recherche, à l'inscription textuelle de cette traversée parfois ratée de la Manche. Par exemple, le style de l'autrice, foisonnant d'ironie et d'humour, a souvent été gommé au profit d'une prose plus classique ou encore plus romantique, en accord avec la conception française de l'art romanesque au féminin. Or, c'est précisément cette posture ambigüe qui permet à Austen de critiquer la société qui l'entoure et les contraintes qu'elle impose aux femmes. Par l'analyse textuelle de différentes versions françaises de trois de ses romans, soit Northanger Abbey (tl 818 [1803]), Pride and Prejudice (1813) et Persuasion (tl818), qui jalonnent les deux derniers siècles, je montrerai comment ces œuvres ont été soumises, au fil du temps, à différents systèmes normalisateurs visant leur annexion. Cette étude diachronique me permettra d'observer directement les mécanismes de la traduction et de la retraduction, parfois théorisés, mais pas assez souvent soumis à l'épreuve de l'analyse textuelle. Grâce aux éléments théoriques et contextuels rassemblés dans la présente recherche, je serai à même d'expliquer les intentions derrière les différents choix effectués par les traducteurs. Je pourrai ainsi contribuer à faire entendre, à travers le voile qui sépare les langues, la voix unique d'Austen. Ainsi accumulés, les résultats de ces trois études traductologiques constituent en soi une histoire récente de la traduction romanesque, puisque mon corpus, qui s'étend de 1821 à 2016, soit près de deux siècles, suit de près l'essor du roman en Europe et peut donc témoigner de l'évolution des pratiques traductives durant cette période, de la crise éditoriale de 1830 à l'essor du livre qu'a connu la France à partir de 1945. Ce type d'analyse, menée sous le mode diachronique plutôt que synchronique, est inédit pour l'œuvre d'Austen, et très rare dans le domaine général de la traductologie, où les études par corpus sont le plus souvent menées sous le mode assisté par ordinateur plutôt qu'en se penchant, comme je l'ai fait ici, sur des extraits sélectionnés pour leur idiosyncrasie. Cette recherche montrera que la traduction n'est pas qu'un principe idéologique ou un objet théorique, mais aussi une pratique tout à fait réelle, qui s'accomplit à travers une chaine de lecteurs menant à l'expression - ou plutôt à la réexpression - commune du texte original. Bien différente d'une simple reproduction, la (re)traduction est une (ré)interprétation qui fixe fugacement, avec plus ou moins de profondeur, le sens de cet original. Chaque événement traductif est une réactivation, une relecture de l'œuvre source qui, à la fois, répond de et participe à l'horizon d'attente des lecteurs. De même, chaque réimpression d'une traduction déjà parue est tout de même une réactualisation de l'œuvre, étant donné l'invisibilité chronique du traducteur. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : TRADUCTION LITTÉRAIRE ; VOIX AUCTORIALE ; RETRADUCTION ; JANE AUSTEN ; LECTURE ; FÉMINISME
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S’il ne fait aucun doute que les activistes féministes queer ont pu reprendre à leur compte le slogan « mon corps est un champ de bataille », elles et ils n’en ont pas pour autant négligé d’investir le langage, ce champ de bataille symbolique. Intervenir sur la langue, se réapproprier les discours de haine en les détournant, sont alors autant de stratégies contre-discursives participant activement au processus de subjectivation. Les enjeux de langage deviennent ainsi un terrain propice pour appréhender le monde, élaborer un espace commun, intelligible et safe, et se constituer en tant que sujet. Ils participent pleinement à l’élaboration politique, identitaire et culturelle de la mouvance ou praxis féministe queer en France. Cette analyse cherche à examiner les dynamiques de traduction au cœur des créations langagières des activistes féministes queer, notamment celles qui relèvent des questions d’autodéfinition. Bien plus qu’une simple formalité de transcription langagière, la traduction soulève des enjeux politiques et culturels déterminants. À partir d’une lecture contextualisée et au plus près des usages, il s’agit ici de souligner l’ambivalence et la complexité de tout processus de traduction, oscillant entre circulation et déformation, réappropriation et reconfiguration.
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À l’occasion de l'arrivée en librairie de la première traduction française du classique afroféministe de bell hooks, Ne Suis-je Pas Une Femme, les éditions Cambourakis et La Centrale Galerie Powerhouse organisent une discussion autour de la traduction du Black Feminism américain en contexte francophone. Modératrice: Amandine Gay Invitées: Leïla Benhadjoudja et Stéphane Martelly
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Cet article traite du contexte intellectuel et social qui génère le questionnement sur les alternatives aux épistémologies occidentales. À cet égard, l'auteur énumère les défis qui attendent la tradition critique occidentale : l'ancien et le nouveau ; la perte des termes critiques ; la relation fantomatique entre la théorie critique et la transformation sociale ; la fin du capitalisme sans fin ; la fin du colonialisme sans fin. Il oppose « la sociologie des émergences » , c'est-à-dire l'accroissement des connaissances, des pratiques et des agents, à « la sociologie des absences » , c'est-à-dire les formes de non-existence (« l'ignoré » , « le résiduel » , « l'inférieur » , « le local » , « l'improductif »). Enfin, à propos des nouvelles orientations épistémologiques, il suggère que les épistémologies du Sud sont fondées sur « l'écologie des savoirs » et sur « la traduction interculturelle ».
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Ce mémoire est un projet d'exégèse biblique féministe. Il a pour objet les personnages féminins de Déborah et de Yaël dans les chapitres 4 et 5 du livre des Juges. Ces femmes font figure d'exception dans le livre des Juges dont les nombreux personnages féminins sont surtout des victimes. En effet, Déborah et Yaël exercent violence et/ou pouvoir: l'une en raison de son leadership pluriel auprès du peuple d'Israël et de son armée; l'autre en tant que meurtrière de Sisera, le chef de l'armée cananéenne. Elles apparaissent toutes deux dans le récit de Jg 4 et le chant de Jg 5, deux versions de la même histoire. Ce mémoire s'inscrit à la suite des travaux de Bal (1988; 1995) sur les rapports entre genre féminin et meurtre en Jg 4-5 et s'inspire de la théorie de la performativité du genre de Judith Butler (2006). Il porte précisément sur les thématiques du genre, de la violence et du pouvoir, et a pour but de cerner les représentations du genre féminin déployées par Déborah et Yaël à travers leurs actes violents et leurs gestes de souveraineté. Deux hypothèses sous-tendent un tel projet. D'abord, l'acte violent, et par extension le geste de souveraineté, sont le véhicule de contenus genrés. Ensuite, bien que l'idéologie patriarcale imprègne l'ensemble de la bible hébraïque, des espaces de liberté pour les femmes existent à l'intérieur des passages relatifs aux personnages de Déborah et de Yaël. De nombreuses méthodes aussi bien diachroniques que synchroniques ont été requises afin de mener a bien une telle recherche: critique textuelle, traductologie, philologie, analyse littéraire, analyse structurelle, critique des formes et narratologie. Le premier chapitre a permis d'établir le texte à partir duquel l'exploration des féminités de Déborah et de Yaël a été possible. En effet, s'y trouvent la critique textuelle et la traduction des chapitres 4 et 5 du livre des Juges. Le second chapitre porte sur les représentations du genre féminin de Déborah, la prophétesse et la juge du récit en prose de Jg 4. Nous avons pu constater que, dans le cas de ce personnage, féminité et puissance sont étroitement liées. De cette « femme de flammes » dépend non seulement le déclenchement des combats, mais aussi la présence divine dont elle est la porte-parole. Par ailleurs, sa fonction de juge s'exerce à la fois dans ses dimensions judiciaire, religieuse, politique et militaire. À travers Déborah, le féminin apparaît clairement comme le sexe fort du récit en prose. Le troisième chapitre traite de nouveau de Déborah, mais telle qu'elle apparaît dans le cantique. Cette puissante chantre dispose d'un pouvoir à la fois lyrique, religieux et politico-militaire. Son discours, particulièrement violent dans les derniers versets portant sur Yaël et la mère de Sisera, évoque à la fois une conscience aiguë de la condition féminine en contexte de violence guerrière et l'impossibilité d'une réelle solidarité féminine en contexte patriarcal. La Yaël du récit en prose est le sujet du quatrième chapitre. La meurtrière y fait la démonstration d'une féminité où se côtoient les stéréotypes féminins de la mère et de la femme adultère/étrangère et plusieurs traits « typiquement » masculins. Sa masculinisation va de pair avec la féminisation et l'anéantissement de l'ennemi qu'elle assassine, Sisera. Le cinquième chapitre du mémoire porte sur les représentations féminines de Yaël dans le cantique. La féminité de Yaël y apparaît d'abord en termes « héroïques », entre autres en raison de la bénédiction qu'elle reçoit. Cette femme étrangère et nomade évoque, à travers les représentations de sa féminité, à la fois l'idéal de la femme nourricière et l'anti-modèle de la femme séductrice. Elle se caractérise avant tout par son ambiguïté et sa grande violence. L'agonie de Sisera entre ses cuisses suggère une imagerie maternelle particulièrement souffrante alors même que c'est un homme qui est violé et violenté. Bref, Déborah et Yaël apparaissent toutes deux comme de véritables héroïnes. C'est en effet un type de féminité héroïque, forte de plusieurs traits dits masculins, que leur fréquentation des lieux de pouvoir et de violence a contribué à construire. Cette féminité constitue une alternative à l'idéal biblique de la « femme de valeur » ainsi qu'à la féminité réifiante de la « femme-utérus ». ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Bible hébraïque, Livre des Juges, Exégèse, Traduction, Déborah, Yaël, Féminisme, Genre, Violence.