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À la fois intimiste et provocante, froide et passionnée, cassante et pénétrante, l'écriture de Nelly Arcan puise sa richesse dans les paradoxes. Le présent mémoire porte sur un contraste fondamental des romans Putain et Folle. Dans ces deux premiers récits d'Arcan, l'aliénation et l'agentivité des personnages féminins cohabitent, s'interpelant constamment l'une l'autre. Dans une perspective féministe, nous proposons une étude qui repose sur la coexistence de ces deux pôles, a priori diamétralement opposés. Or, nous verrons que les deux concepts sont intimement imbriqués. L'aliénation des protagonistes arcaniennes s'inscrit à même leur corps sexué, car elles sont engluées dans la réification corporelle qui caractérise, détermine et fixe leur identité. Elles s'évaluent et se jugent continuellement par l'intermédiaire des normes, des canons et des stéréotypes qui encadrent et contraignent l'expression de leur féminité. En construisant avec soin leur image, en concevant leur identité à travers le regard de l'Autre (masculin) et les discours de la doxa, les personnages féminins portent sur eux-mêmes un regard faussé et en viennent à se concevoir presque entièrement comme des objets de désir, voire des objets tout court. Si, dans leurs actions pour se conformer à un idéal féminin, elles ont peu de rapport direct à leur subjectivité, leur voix est quant à elle le véhicule d'une vive protestation. L'acte d'écriture, qui transmet leur parole contestataire, permet l'émergence de l'agentivité des narratrices. En faisant appel à des stratégies textuelles de réappropriation, telles la resignification de l'injure et l'intertextualité avec les contes populaires, elles décrient certains stéréotypes sexuels compris dans la doxa. Ce faisant, elles s'instituent sujets de discours et de critique sociale; en imposant leur regard personnel, elles se réapproprient leur image. Ainsi, la subjectivité divisée des narratrices de Putain et Folle révèle une ambivalence constitutive que nous appréhendons à travers ces deux charnières conceptuelles. Nous concluons sur ce troisième pôle qu'est l'ambivalence produite par une oscillation constante entre aliénation et agentivité, qui engendre, chez les protagonistes, une scission douloureuse de leur identité. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Nelly Arcan, Putain, Folle, rapports sociaux de sexe, aliénation, agentivité, ambivalence, corps, féminité, stéréotypes sexuels.
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Dans les sociétés occidentales, malgré le progrès significatif des droits des femmes, les représentations culturelles demeurent, encore aujourd'hui, très souvent misogynes. Cette phallocratie symbolique est particulièrement apparente dans la pornographie et dans la littérature érotique, mais elle se manifeste également dans les médias de masse, où son danger potentiel est décuplé par la multiplication exponentielle des moyens de diffusion, caractéristique de l'époque postmoderne. Nancy Huston fait partie de ces auteures féministes qui, tant par la théorie que par la fiction, cherchent à mettre en évidence la violence de ces images ainsi que leurs conséquences dans la vie des femmes. Par le biais d'une parodie du roman pornographique Histoire d'O, de Pauline Réage, elle s'en prend à la soumission sexuelle des femmes et surtout, à la prégnance de cette représentation dans l'imaginaire collectif. Notre mémoire aborde la manifestation de cette critique dans son roman Histoire d'Omaya, qui, contrairement au roman de Réage, dépeint une femme qui refuse la violence qui lui est imposée. Une étude de l'image traditionnelle de la femme dans la pornographie et la littérature érotique est proposée et, à l'aide de théories féministes postmodernes sur la parodie, les différentes marques de la critique d'Histore d'O sont analysées. Parmi ces marques, l'omniprésence du regard masculin est davantage développée, puisque celui-ci représente un élément central du roman de Huston. Ce regard participe non seulement à la réification de la protagoniste mais constitue également un prélude au viol. Enfin, une analyse de la polyphonie constituante du roman est présentée, de manière à mieux comprendre l'aspect contestataire que revêt cette forme narrative erratique et hérétique. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : littérature érotique, pornographie, Pauline Réage, Nancy Huston, parodie, regard, réification, polyphonie, hystérie, postmodernisme, féminisme, genre.
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This study by Cristina Ferreira-Pinto explores the poetic and narrative strategies twentieth-century Brazilian women writers use to achieve new forms of representation of the female body, sexuality, and desire. Female writers discussed include: Gilka Machado, Lygia Fagundes Telles, Marcia Denser, and Marina Colasanti. While creating new forms, these writers are also deconstructing cultural myths of femininity and female behavior. In order to understand these myths, the book also presents new readings of some male-authored canonical novels by Jose de Alencar, Machado de Assis, Manuel Antonio de Almeida, and Aluisio Azevedo. The specific focus on female sexuality and desire acknowledges the intrinsic link between sexuality and an individual's sense of identity, and its importance for female identity, given the historical repression of women's bodies and the double standard of morality still pervasive in many Western cultures. In the discussion of the strategies Brazilian female poets and fiction writers employ, Ferreira-Pinto addresses some social and cultural issues that relate to a woman's sense of her own body and sexuality: the characterization of women based on racial features and class hierarchy; marriage; motherhood; the silencing of the lesbian subject; and aging. Ferreira-Pinto's analysis is informed by the works of various and diverse critics and theoreticians, among them Helene Cixous, Teresa De Lauretis, Adrienne Rich, Gloria Anzaldua, Georges Bataille, and Wilhelm Reich.
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Ecrire Amantes, pour Nicole Brossard, c'est, nous semble-t-il, tenter de prouver que l'approche du délire est compatible avec l'esprit (cf. p. 13). Dans cette optique, la fiction pratiquée ne peut-être qu'"excès de réalisme". L'oeuvre, comme l'indique l'autrice, ne fait pas de confidences et cependant quelque chose est confié à la compagne-lectrice privilégiée, qui représente le lecteur, sans cesser d'exister. Un lecteur masculin, implicitement exclu, peut-il rendre justice à un tel ouvrage : "entre femmes, la mémoire revient comme une conscience". Il est en tous cas frappé par la façon dont l'abstraction ("excès de réalisme"?) y exerce son pouvoir ("toute vision est en soi mathématique de l'espace"), même si l'autrice multiplie les ancrages dans le réel (banalisé) d'un temps employé, et fait appel à un implicite émotif très fort ("l'expérience infligée au corps des femmes incite à la réalité"). Entre l'essai et le poème, ce texte manifeste une ligne de pensée ferme, l'allusion étant au service exclusif de la thèse. Mais la passion ("de l'intime au politique"), figure centrale de ce livre, fait plus souvent figure de rhétorique, que d'"opéra du dedans." Il s'agit de la poésie de Nicole Brossard, qui s'est imposée comme théoricienne et écrivaine féministe lesbienne et comme figure de proue des écrivain.e.s postmodernistes québécois.e.s. Son travail brouille les frontières entre fiction et théorie, subvertissant les fictions que le discours patriarcal a tissées sur la vie des femmes en travaillant avec les « réalités » de la vie des femmes qui se situent en dehors des codes de la fiction.