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L’autodéfense féministe est un phénomène important dans les milieux militants contre les violences sexistes et sexuelles. Elle a traversé les époques et les frontières en revêtant différentes formes. Il s’agit pourtant d’un sujet qui a suscité peu d’intérêt dans le domaine académique. Son étude comporte divers défis, notamment quant à l’absence de consensus sur la définition de cette discipline et à la difficulté de repérer ses événements lorsqu’ils furent l’objet de répression sociale. Ce mémoire de recherche en travail social s’intéresse particulièrement à l’expérience des survivant- e-s de violence sexuelle qui ont participé à des cours d’autodéfense féministe. Afin d’explorer ce sujet, la recherche s’appuie sur deux méthodes de recherche complémentaires. D’abord, elle fait la documentation des cours d’autodéfense féministe s’étant tenus à Montréal au cours des dix dernières années afin de contextualiser la discipline à l’étude. Ensuite, des entretiens individuels ont été menés avec huit survivant-e-s de violence sexuelle ayant pratiqué l’autodéfense féministe, à partir desquels ont été rédigés des récits voulant trouver les thèmes significatifs à leurs expériences. La méthodologie de cette recherche qualitative s’inscrit en phénoménologie féministe et accorde une importance particulière au processus de dé/subjectivation dans l’expérience de la violence. Les thèmes abordés lors des entretiens avec les survivant-e-s concernent à la fois les changements constatés dans leurs rapports émotionnels et corporels à la vulnérabilité, leurs perceptions des institutions étatiques et l’importance accordée au rôle des collectivités dans leur recherche de guérison. L’analyse permet d’y découvrir un intérêt marqué pour les pratiques de solidarité ainsi que l’existence d’un processus d’empowerment qui échappe à l’injonction néolibérale du succès individuel. Cela permet d’élaborer une analyse critique du traitement punitif des problèmes sociaux et une vision de la lutte à la culture du viol qui s’attaque aux racines des dynamiques de pouvoir genrées. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : autodéfense féministe, violence sexuelle, intervention féministe, empowerment, culture du viol, solidarité
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Malgré l’entrée massive des femmes sur le marché du travail et les avancées que l’on doit aux mouvements féministes, le patriarcat demeure un paradigme dominant à l’égard de la question familiale (Descarries et Corbeil, 2002ª). Dans sa version plus contemporaine, le consensus social concernant la famille est aussi imprégné de l’influence de l’épidémiologie sociale, un paradigme qui supporte une ambition scientiste et normative (Parazelli et al., 2003 et Parazelli, 2013). Comme la mère porte implicitement la responsabilité de l’ordre familial et par extension, de l’ordre social, cette normativité est étroitement liée au genre (Cardi, 2007; 2010 et 2015). Cette recherche s’ancre dans les épistémologies féministes. Elle propose une démarche qualitative, exploratoire et critique en s’intéressant à la réalité des mères qui pratiquent le travail du sexe à partir de l’idée selon laquelle « on ne peut être mère et putain à la fois » (Ovidie, 2018). Le stéréotype de la mère s’oppose effectivement à celui de la putain dans l’imaginaire social (Descarries et Mathieu, 2009). Les mères qui pratiquent le travail du sexe doivent ainsi réconcilier leur posture d’être humain discrédité en regard de leur travail et leur identité de mère, laquelle est soumise à des injonctions normatives de plus en plus élevées (Samtani et Trejos-Castillo, 2015). Nous exposons les données issues d’entrevues semi-dirigées réalisées auprès de huit mères exerçant le travail du sexe afin d’explorer leur expérience de l’articulation famille-travail. Cette expérience est traversée par la gestion des temps et des espaces de la vie familiale et du travail, laquelle relève surtout de la mobilisation de stratégies personnelles par les mères. Ces constats correspondent aux connaissances portant sur l’articulation famille-travail (Descarries et Corbeil 2002ᵇ; Malenfant, 2002; Tremblay, 2003 et Seery, 2014 et 2020). S’agissant des mères que nous avons rencontrées, cette expérience a cependant de particulier qu’elles doivent composer avec le stigmate de putain (Pheterson, 2001). Nous avons donc recours à certains travaux portant sur la stigmatisation symbolique et structurelle aux fins d’analyse et de discussion de nos résultats de recherche. On relève deux grands types de stratégies employées par ces femmes pour faire face au stigmate de putain : elles s’en distancient ou elles lui résistent. La valorisation dans le travail compte parmi les stratégies de résistance. À ce sujet, elles énoncent des réalités et des compétences se rapportant au travail du care. Ainsi, la perspective du care est également mobilisée dans notre cadre conceptuel. Nous réfléchissons notamment au travail du sexe comme travail du care à la lumière des concepts de travail émotionnel (Hochschild, 2003 et 2012), de sale boulot (Lhuilier, 2005 et Molinier 2011) et de défenses collectives féminines et viriles (Molinier, 2000; 2002 et 2004), alors qu’une part importante du travail du care demeure stigmatisée en tant que sale boulot (Molinier, 2011) et que le travail émotionnel est sous-pesé dans l’appréhension de la valeur du travail du care (Molinier, 2011 et 2020). De plus, bien que la dimension du care soit transversale aux activités de soins et de services aux personnes, elle est généralement occultée du sexuel (Molinier, 2009 et 2011). Ces idées nous permettent d’éclairer le discrédit porté à l’endroit des mères pratiquant le travail du sexe et de réfléchir à leurs avenues de reconnaissance et de citoyenneté. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : travail du sexe, mères, articulation famille-travail, féminisme, patriarcat, imaginaire social, discours sociaux dominants, significations imaginaires sociales, stigmatisation, stigmate de putain, travail du care, travail émotionnel, sale boulot, défenses collectives
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Historiquement, la grossesse et l'accouchement étaient le champ de pratique des sages-femmes et traduisaient les savoirs empiriques qu’elles et d’autres femmes avaient développés sur leur corps. Mais, aux 19e et 20e siècles, en Occident, les sages-femmes perdent la main mise sur l'accouchement au profit de la nouvelle profession médicale omnipotente, métier historiquement réservé aux hommes. L’obstétrique-gynécologie voit le jour sous la lunette misogyne et raciste d’hommes qui tentent de mener cette spécialité vers la reconnaissance et la gloire auprès de leurs pairs, parfois aux dépens des femmes surtout noires ou pauvres. De nos jours, au Québec et à travers le monde, des voix s’élèvent pour dénoncer la violence obstétricale subie par les personnes qui accouchent : des abus, des mauvais traitements et des non-respects des droits des personnes vécus durant la grossesse et l’enfantement. Ainsi, c’est avec une posture épistémologique féministe que cette recherche tente, à partir de témoignages de femmes ayant enfanté dans le milieu hospitalier au Québec, de comprendre l’expérience d’accouchement dans un lieu où les rapports de pouvoir sont inégaux. Cette recherche qualitative croise les données avec deux théories clés : les savoirs faisant autorité et l’injustice épistémique. Trois points saillants ressortent de l’analyse : 1) ce sont les soignant·es qui détiennent les savoirs faisant autorité et avec eux le pouvoir décisionnel dans la salle d’accouchement. 2) Les personnes qui accouchent sont victimes d’injustice testimoniale au moment de l’enfantement. 3) L’injustice herméneutique nuit à la reconnaissance et à la lutte contre les violences obstétricales. Finalement, cette recherche met en lumière que les injustices épistémiques que vivent les personnes qui accouchent en milieu hospitalier au Québec sont la toile de fond dans laquelle s’enracinent les violences obstétricales. L’analyse témoigne de la nécessité de renverser les rapports de pouvoir inégaux dans la salle d’accouchement et de changer de paradigme autour de la naissance afin d’obtenir plus de justice périnatale. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Injustice épistémique, savoirs faisant autorités, violence obstétricale, accouchement, justice périnatale, rapports de pouvoir.
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Ce projet porte sur les liens entre les pratiques artistiques et le changement social dans la lutte contre le racisme. Il a pour but d’étudier la réception de la fresque La vie des Noir·e·s compte, réalisée sous la direction de Never Was Average, et implique de porter attention non seulement sur l’oeuvre et l’appréciation de celle-ci, mais aussi sur les modalités de sa production au Québec et à Montréal, en particulier. Les objectifs poursuivis sont les suivants : (1) recueillir et documenter le point de vue de celles et ceux qui ont vu la fresque ; (2) identifier les réflexions et les actions par rapport au racisme anti-Noir·e·s ; (3) outiller les milieux artistiques et militants noirs ; (4) contribuer à la recherche sur/de la race en travail social féministe. Théoriquement, la recherche s’ancre dans trois axes d’analyse, à savoir : les féminismes noirs, la théorie critique de la race (Critical Race Theory), et les Cultural Studies. J’adopte également la notion d’intersectionnalité pour appréhender la subjectivité des participant·e·s (genre, race, classe, etc.) et les processus qui les sous-tendent. L’épistémologie féministe et la méthodologie qualitative interprétative critique permettent une démarche exploratoire, féministe et engagée. Un focus groups a réuni cinq personnes qui ont discuté l’appréciation de la fresque, la compréhension du message, et les réflexions générées chez elles par la fresque. L’analyse des données de l’entrevue par catégories conceptualisantes mène vers la théorisation enracinée des retombées de la fresque en lien avec la lutte au racisme anti-Noir·e·s. Le détail des résultats contribue à offrir une vision complexifiée du médium artistique, entre autres, dans une perspective de résistance, mais aussi de la langue et de la politisation des vies noires. Le poids de la langue, ici la langue française, révèle, une diversité d’enjeux allant des représentations culturelles qui circulent en société aux dynamiques sociopoliques qui marginalisent les personnes Noires. La manipulation politique perçue par les participantes entourant l’oeuvre évoque des sentiments de déception et la perte de confiance à l’égard des pouvoirs politiques. La discussion critique de ces éléments met en lumière des espaces où se joue la racialisation et les rapports de pouvoir dans le contexte québécois. En conclusion, des pistes de réflexion pour la recherche critique de la race en travail social, ainsi que des suggestions pour la pratique sont proposées. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : arts, artivisme, réception, travail social, travail social féministe critique, race, racisme, Montréal, féminismes, féminismes noirs, Québec.