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Les pratiques drag king (PDK) émergent en contexte étatsunien entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, à partir de l’enchevêtrement entre subcultures sexuelles, subcultures de genre et techniques performatives expérimentales. Elles se diffusent par la suite en Italie à la fin des années 1990. Traditionnellement historicisées et problématisées par des théoricien.ne.s et des activistes anglophones (Halberstam, 1998a ; Volcano et Halberstam, 1999 ; Torr et Bottoms, 2010), les PDK ont généralement été comprises comme des performances de femmes (hétérosexuelles, lesbiennes ou queers, supposément cisgenres) s’habillant en hommes pour dénaturaliser la masculinité par son imitation (Torr et Bottoms, 2010). Néanmoins, cette conceptualisation est limitée par des présomptions anglonormatives étasuniennes (Baldo, Borghi et Fiorilli, 2014 ; Baril, 2017) et cisnormatives (Baril, 2016). Elle occulte également les spécificités des PDK dans divers contextes nationaux et elle efface spécifiquement les sujets trans. Afin de pallier à ces limites, cette thèse analyse les contributions théoriques et heuristiques des voix trans, non binaires et non cisgenres italiennes pour conceptualiser les PDK actuelles à partir de quinze entrevues semi-dirigées, conduites en Italie dans le cadre d’une ethnographie de type « affinitaire ». Traité selon une analyse thématique (Paillé et Mucchielli, 2016), le matériau offre trois macro-rubriques : les critiques de la reproduction de masculinités toxiques et de biais hétérocisnormatifs et homonormatifs en milieu d’ateliers DK, la reconnaissance du DK comme espace de subjectivation et enfin la mise en lumière des tensions entre DK et postures trans. Ces macro-rubriques ont été discutées en puisant dans un cadre théorique et conceptuel qui repose sur les études trans, les études féministes, les études sur les masculinités et sur des perspectives issues des productions subculturelles queers, trans et des mouvements sociaux. Premièrement, les entrevues montrent que l’on peut, dans les ateliers DK, recentrer et reproduire des masculinités hégémoniques et créer des dynamiques homosociales oppressives en délégitimant à la fois les masculinités subalternes et les désirs des participant.e.s de s’identifier avec celles-ci. Elles ont également souligné la nécessité de dépasser l’idée que le DK aurait une base biologique (le sexe féminin assigné à la naissance). Cette vision ne respecte pas l’autodétermination des participant.e.s, occulte leurs trajectoires de vie et les raisons qui les poussent à expérimenter. Deuxièmement, les témoignages démontrent que les PDK sont une pratique de subjectivation pour explorer un potentiel genre désiré ou construire et affirmer son propre genre. Elles sont donc une cyber-technologie des corps et des genres trans, non binaires et non cisgenres selon un principe de soutenabilité par rapport au genre. Elles représentent un contexte où re/trouver une masculinité « soutenable » ainsi qu’éthique et solidaire avec d’autres sujets marginalisés et d’autres luttes de justice sociale. De plus, les PDK peuvent être des catalyseurs de futurs queers, au sens d’espaces d’articulation de masculinités trans queers et pédées. Troisièmement, la recherche a créé un espace d’expression pour aborder la question de la transnormativité en Italie. Non seulement cette normativité influence la perception de soi des participant.e.s, mais elle repose sur une « comptabilisation des privilèges » qui est utilisée pour produire des hiérarchies de légitimité au sein des réseaux trans. De fait, le terrain a permis de détecter un « privilège de subjectivation » possédé par les personnes qui se conforment au protocole de transition officiel. Enfin, les témoignages ont relevé le double standard faisant en sorte que les genres cis soient jugés différemment par rapport aux genres trans au sein des PDK. Les personnes trans sont soumises à une surveillance supplémentaire qui les pousse à devoir démontrer un sentiment de cohérence et de persistance dans l’identification avec leur genre d’élection. Les contributions théoriques et heuristiques des voix trans, non binaires et non cisgenres italiennes pour approcher et conceptualiser les PDK actuelles sont très riches et permettent de renouveler non seulement les études sur le DK, les études trans, sur les masculinités, de genre et transféministes mais éventuellement les PDK elles-mêmes. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : pratiques drag king, théories drag king, Italie, masculinités, transitude, études trans, sociologie du genre, transféminisme, technologies de genre, transnormativité, ethnographie affinitaire.
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En s'appuyant sur les outils théoriques développés par les féministes matérialistes depuis les années 1970, cette recherche propose un regard inédit sur les rapports humains/animaux dans le cadre de l'institution de l'élevage. En situant cette dernière dans la continuité des rapports d'appropriation que sont le servage, l'esclavage et le sexage, il s'agit de donner à voir le processus d'animalisation - c'est-à-dire de mise en situation minoritaire - des individus· élevés, mais aussi de contrer les différentes stratégies idéologiques visant à occulter la dimension organisée, arbitraire et violente de ce processus. Après avoir repéré quelques-unes de ces stratégies dans la recherche en sciences sociales (spècies-blindness et recours au paradigme maussien don/contre-don pour théoriser l'élevage), un corpus de 139 contenus publicitaires pour des produits issus de l'élevage (publispécisme) est analysé. À travers une approche socio-sémantique et par la constitution d'une typologie en quatre classes, nous montrons que les animaux y sont soit absents en tant qu'individus (référents absents), soit présents en tant qu'animalisés, déjà-viande et toujours disponibles (différents présents). Ces résultats viennent en appui de la thèse de Colette Guillaumin selon laquelle les rapports d'appropriation produisent une idée de Nature leur permettant de s'inscrire dans le règne du spontané et du légitime. Nous concluons sur la nécessité, aussi bien épistémologique que politique, d'inclure la question des rapports sociaux d'espèce dans les recherches sur les rapports de pouvoir et les inégalités. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : anthropocentrisme, animalisation, humanité, animalité, rapports sociaux d'espèce, publispécisme, naturalisation, féminisme matérialiste
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Face au constat de normes contraignantes entourant l’expression des musiques vivantes en milieu urbain ainsi que des fermetures récurrentes de lieux d’accueil des concerts, ce mémoire propose de se pencher sur les manières dont la scène musicale alternative DIY parisienne s’implante dans le tissu urbain. Sous le prisme du droit à la ville d’Henri Lefebvre (1968/2009), ce mémoire s’intéresse aux espaces que cette scène DIY occupe et vise à mettre au jour les facultés d’adaptation de ses membres. Après avoir étudié dans la littérature quelles étaient les difficultés fréquemment rencontrées par les organisations de concerts DIY, sera abordée la question de la conflictualité dans l’espace urbain, en insistant en particulier sur le développement du processus de gentrification en région parisienne et sur le droit à la ville en tant que forme de contestation de la valeur d’échange de l’espace urbain. Ce mémoire propose de faire le pont entre les pratiques DIY et le droit à la ville, les deux proposant des manières contre-hégémoniques et collectives de faire, d’agir, de créer, tout en rejetant la marchandisation de leurs pratiques ou de l’espace. À travers le cadre d’analyse des scènes, c’est en interrogeant dix membres d’organisation de concerts DIY que cette recherche permettra de rendre visibles les modalités d’appropriation de l’espace urbain de cette scène musicale particulière. La répartition géographique des concerts DIY et de leurs lieux d’accueil en région parisienne sur une période d’un an sera également examinée, ce qui permettra d’observer la dispersion géographique de cette scène, ses différentes catégories de lieux d’accueil ainsi que ses établissements de prédilection. Seront ensuite mises au jour les difficultés particulières que rencontrent les organisations de concerts alternatifs DIY parisiennes ainsi que leurs manières d’y faire face, mais aussi le rapport que les participant·e·s entretiennent avec les lieux d’accueil des concerts. L’objectif sera de comprendre ce qui pousse les organisations de concerts alternatifs DIY à avoir recours à certains lieux plutôt qu’à d’autres et ainsi observer comment cette scène s’adapte à son environnement et parvient à durer. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : DIY, scène, musiques alternatives, droit à la ville, Paris, gentrification, espace urbain
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Au lendemain des attentats de janvier 2015 à Paris, le ministère de l'Éducation nationale français prend une série de mesures pour mieux former les élèves à la laïcité et aux valeurs de la République. Cette recherche qualitative, effectuée dans l'éducation prioritaire à Marseille, s'intéresse à la mise en œuvre de ce projet en se penchant plus particulièrement sur ses acteurs centraux : les enseignants. Si ceux-ci confirment la forte présence de la religion chez leurs élèves, pour autant, à contrecourant des discours publics régulièrement alarmistes, ils jugent que les situations liées au religieux s'avèrent rarement problématiques. Un tel constat n'est pas le fruit d'un angélisme généralisé, puisqu'une majorité de ces enseignants sont plutôt porteurs d'un discours républicain prônant une application stricte de la laïcité. Pour autant, ils mobilisent généralement un vocabulaire très libéral pour la définir. En dépit de ces points communs, leurs interprétations personnelles demeurent très fragmentées, ce qui les conduit à des mises en œuvre très variées, qui visent plus particulièrement les élèves musulmans. D'ailleurs, ces derniers sont nombreux à croire que la laïcité les cible spécifiquement. Subséquemment, la vision positive portée par l'EMC ne parvient pas à compenser l'impression négative laissée par leur propre expérience. Les parcours biographiques agissant de manière déterminante sur les compréhensions de la laïcité, tant chez les enseignants que chez les élèves, la faisabilité d'un projet visant la transmission uniforme de la laïcité comme culture commune se voit fortement questionnée. Émerge même l'idée d'une « laïcité sensible » émanant d'expériences subjectives et relationnelles, dont l'impact primerait sur les compréhensions découlant des débats publics ou des prescriptions légales. D'ailleurs, les quelques tensions « religieuses » dans les écoles apparaissent moins directement liées à cette question ou à celle des valeurs qu'à une question relationnelle. Elles pourraient se voir largement réduites par une formation professionnelle plus adaptée et par un discours public moins ciblé : l'association politico-médiatique entre laïcité et islam aggrave en effet les crispations de certains enseignants vis-à-vis du religieux, les conduisant à n'analyser les comportements des élèves musulmans que par le prisme religieux, au détriment d'autres facteurs d'explication. Pour finir, au-delà du seul domaine scolaire, cette recherche documente empiriquement l'impasse analytique que représente l'opposition binaire entre laïcité stricte et laïcité inclusive et met en lumière au contraire l'existence d'une variété de postures, hybrides et fluides, entre ces deux extrêmes. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Laïcité, école, enseignement, transmission, France, Islam
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Cette étude sexologique sur la construction sexuelle identitaire se déroule à l'Île de La Réunion, qui présente des spécificités en tant que territoire postcolonial francophone, avec des formes résurgentes d'oppression structurelles dans l'organisation sociétale, ainsi qu'une forte prégnance des pratiques religieuses. De ce fait, les construits sociaux délimitent les interactions sociales au sein d'une population dont le métissage, visible de prime abord, laisse penser que La Réunion serait l'archétype de tolérance dans une société rêvée. L'étude vise à comprendre comment les personnes qui se définissent comme homosexuel-le-s ou bisexuel-le-s peuvent construire leur identité sexuelle dans ce contexte insulaire ultrapériphérique. De type qualitatif, l'étude s'appuie sur un échantillonnage non probabiliste, composé de douze participant-e-s recrutés en boule de neige, donnant lieu à une collecte de données à partir d'entrevue individuelles semi-dirigées. Les récits recueillis indiquent que les personnes adoptent comme stratégie identitaire, au moment où elles découvrent leur attirance sexuelle pour l'autre de même sexe, le déni de soi en gardant le secret absolu sur ce qu'elles éprouvent, et ce, même si elle ont ressenti du plaisir lors de cette découverte. La détermination de soi se fait au travers d'un long cheminement, avant de passer à l'affirmation de soi. La construction identitaire sexuelle des personnes homosexuelles ou bisexuelles est jalonnée de réactions homophobes provenant de leurs familles, de leurs ami.e.s et de leur environnement en réponse à l'expression de leur identité sexuelle. Les stratégies adoptées, tout au long de leur construction identitaire, ont pour fonction de gérer les tensions qui découlent des attentes et des attributions identitaires en conflit avec leurs ressentis, leurs désirs, ainsi que le besoin de reconnaissance sociale de leur identité sexuelle. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Construction identitaire sexuelle, coming out, homosexualité, bisexualité, hétérosexualité, stratégies identitaires, La Réunion.
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La volonté de ce projet de maîtrise consiste à analyser la manière dont les représentations de figures genderqueers en art actuel participent à une réflexion critique des notions d'identité et de sexualité comme lieux privilégiés de résistance à l'hétéronormativité. Je souhaite démontrer à quel point la représentation du corps queerisé peut agir comme espace stratégique d'une repolitisation de la sexualité et de l'identité et ainsi contribuer à une micropolitique de résistance. Par le truchement des politiques et théories queers et féministes, les pratiques artistiques polymorphes de J.J. Levine, Dorothée Smith, Nina Arsenault et Virginie Jourdain questionnent et critiquent l'hétéronormativité et ses discours pour en dévoiler les principaux axiomes idéologiques et ainsi en déconstruire l'apparente naturalité. Dans l'objectif de comprendre et d'articuler les enjeux que sous-tendent les théories féministes et queers actuelles, je vais m'attarder plus spécifiquement à en circonscrire les prémisses enracinées dans le contexte postmoderne. En revisitant des auteurs clés tels Michel Foucault et Judith Butler, je souhaite mettre en lumière leurs contributions intellectuelles et théoriques pour la constitution d'une pensée critique des identités et des sexualités. Les représentations de figures genderqueers en art actuel participent ainsi d'une déconstruction des présupposés immanents de l'hétéronormativité dont le genre est en quelque sorte l'ancrage ontologique. En jouant de ces codes hégémoniques de manière à en désamorcer la violence symbolique, Smith, Levine, Jourdain et Arsenault participent à une remise en cause des concepts même d'identité et de sexualité pour nous faire entrevoir de possibles subjectivations dissidentes. À la source de mes réflexions, il y a ainsi une volonté épistémologique de produire un savoir mutant, progéniture androgyne d'une multitude de penseurs qui n'ont de cesse de nourrir la discipline de l'histoire de l'art. Ce mémoire est donc le mariage polygame de méthodologies hétéroclites dont l'objectif ultime est la production d'un savoir queer riche et sensible. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : postmodernisme, queer, identités, sexualités, genderqueer, J.J. Levine, Dorothée Smith, Virginie Jourdain, Nina Arsenault, micropolitique de résistance, subjectivités dissidentes, hétérotopies identitaires, hétéronormativité, pharmacopornographie.