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Si la critique féministe adressée à la production des savoirs est désormais institutionnalisée et relativement bien implantée en France et au Québec (Lagrave, 1990 ; Parini, 2010), elle n’a cependant affecté qu’à la marge les pratiques de recherches (Ait Ben Lmadani et Moujoud, 2012 ; Mathieu, 1999) A partir de nos positions situées (Hill Collins, 2008 [1990] ; hooks, 2017 [1984], Bilge, 2015), et de notre expérience de recherche sur des sujets minoritaires, nous revenons sur notre expérience commune de l’organisation d’un atelier sur « les féminismes des marges », proposé lors d’un congrès de sciences sociales au Canada. Cette initiative, qui ambitionnait d’interroger les fondements épistémologiques à l’œuvre dans nos disciplines respectives, nous semble constituer un cas limite (Hamidi, 2012) intéressant, pour penser les effets de l’ordre du genre, de la racisation, et des inégalités géopolitiques en matière de production et de valorisation de savoirs « peu légitimes » au sein de l’espace universitaire (Larcher, 2018). A partir d’un dialogue entre nos différentes perspectives, nous avons alors tenté d’élaborer une pensée commune pour dessiner une ligne de crête, sur laquelle pourraient cheminer les « halfies » (Abu Lughod, 1991), qui, comme nous, articulent leur présence dans des espaces de pouvoir avec des positions minoritaires.
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À partir d’une réflexion sur le black feminism , cet article traite de l’articulation entre domination de genre et racisme, en tant qu’elle constitue l’un des enjeux théoriques et politiques les plus importants du féminisme anglo-saxon : dans quelle mesure l’expérience de la ségrégation raciste modèle celle du sexisme et met à mal l’unité politique du féminisme ? Si le sujet idéologique « femme » a implosé sous la critique du patriarcat, qu’en est-il du sujet politique du féminisme lui-même, « Nous les femmes » ? Notre thèse consiste à montrer comment les discours de la domination mettent à disposition des groupes opprimés des cadres anhistoriques qui réifient sans cesse ces mêmes groupes, jusque dans leurs affirmations positives. Dans ces conditions, en voulant déessentialiser le sujet du féminisme, « les femmes », le risque est de le renaturaliser en une myriade de sous-catégories (les femmes noires, les femmes voilées, les femmes migrantes...) qui deviennent des préalables aux luttes. De notre capacité à révéler l’historicité de l’entremêlement des catégories de « sexe » et de « race » et à user de techniques de tumultes à même d’inventer un autre langage politique, dépend notre capacité d’agir et de se penser comme sujets politiques en devenir.
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La littérature psychanalytique s'est développée autour du concept d'un espace pour le désir structuré selon le modèle des rapports du garçon à sa mère. La clinique de la féminité, concurremment avec l'apport historique du féminisme, découvre-t-elle un espace autre pour le désir féminin ? La psychotique pour qui la place du père est restée vide dans la parole de la mère, refuse la Loi comme représentant de l'autorité sociale. Quant à l'hystérique, elle ne se fie pas au Père comme rempart contre le vide qui se profile derrière les Lois et les croyances des hommes. À sa façon, le féminisme reprend, en les projetant sur la scène sociale, ces positions de refus psychotique et de contestation hystérique et requiert de nouvelles formes de vie sociale qui s'articulent à l'espace esthétique dont les femmes ont besoin pour vivre comme citoyennes à part entière.
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Il est important d'expliciter le rapport qui relie le vécu privé des femmes à leur vie professionnelle, et, sous la dépendance matérielle, de faire surgir la dépendance affective. Celle-ci est liée aux positions dissymétriques occupées par les hommes et les femmes dans la relation amoureuse, qui sont une des marques sociales de la différenciation sexuelle dans la société moderne