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Dans le sillage de l’ouvrage dirigé par Octobre et Patureau (Octobre et Patureau 2018), cet article engage à une réflexion sur le traitement de la question du genre dans les dispositifs numériques de médiation produits par des organismes de diffusion et de production musicale. Les études en sociologie du travail artistique (Coulangeon et Ravet 2003 ; Buscatto 2007 ; Bousquet et al. 2018) ne cessent de montrer que l’ensemble des mondes de la musique, aussi bien classiques que jazz ou pop, est traversé par une double ségrégation genrée horizontale (répartition sexuée selon le type d’emploi) et verticale (moindre accès aux postes à responsabilités). On pourrait imaginer que les producteurs de dispositifs numériques de médiation de la musique, portant des valeurs de vivre-ensemble, d’inclusion sociale et d’agentivité (Perez-Roux et Montandon 2014 ; Carrel 2017), et conscients des effets normatifs et prescriptif des supports éducationnels (Octobre 2014), viennent questionner ces frontières. Le « dénombrement » et l’analyse de « cas » tirés du dépouillement systématique d’une centaine dispositifs numériques consultables en ligne et produits par des organismes de production et de diffusion musicale permettront de montrer que tel n’est pas le cas.
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En mars 2019, Stéphanie Vallet a publié un article dans La Presse portant sur la sous-représentativité des artistes féminines dans le palmarès Billboard « Canadian Hot 100 ». Les résultats de son étude démontrent une forte décroissance de la présence des femmes dans l’industrie musicale canadienne — un écosystème dans lequel les ondes radio continuent de jouer un rôle important quant à la découvrabilité et à la professionalisation des artistes. Cependant, au-delà des questions de genre abordées par Vallet, les enjeux liés à la représentativité des artistes issu·es de la diversité ethnoculturelle et linguistique à la radio doivent également être soulevés. Les théories de « social remembering » (Misztal 2003 ; Strong 2011) offrent un cadre critique pour se pencher sur les « Big Data » compilées par des industries où les femmes et les artistes racisé·es semblent systématiquement désavantagé·es. Dans le but d’entamer le portrait de la représentativité sur les ondes de la radio commerciale au Québec, cet article aborde la représentativité des artistes minorisé·es sur les ondes de CKOI-FM (96.9) de Montréal. CKOI-FM a été choisie non seulement parce qu’il s’agit d’une station francophone « top 40 » (diffusant tous les genres musicaux), mais aussi parce qu’entre 2015 et 2017 elle utilisait le slogan « Changeons le monde un hit à la fois » (Girard 2017) — un message à fortes résonances avec les slogans militants visant la justice sociale. Ce projet offre donc l’occasion d’investiguer la validité des déclarations faites par une radio qui se vante de « changer le monde ». En adoptant une approche féministe intersectionnelle à l’analyse des données appelée « data feminism » (d’après D’Ignazio et Klein 2020), cette étude évaluera les différents taux de représentativité à CKOI-FM parmi les 100 chansons les plus jouées chaque année entre 2010 et 2020 afin de considérer le rôle que jouent les ondes radio dans la formation de la culture musicale populaire au Québec et, par extension, de la mémoire sociale.
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Cet article porte sur le processus de création du premier Sarau das Minas Montréal : une soirée de sororité artistique qui s’est déroulée le 8 mars 2020. Il s’agit d’un événement artistique conçu, dirigé et réalisé par une équipe de femmes, immigrantes et allophones. Cet événement est ancré, d’une part, dans une démarche féministe empirique inductive visant la construction d’une scène sûre pour des artistes femmes immigrantes et allophones. D’autre part, il s’inspire de l’analyse préliminaire des données de ma recherche de doctorat sur les musicien·nes immigrant·es oeuvrant sur le marché de la « musique du monde » à Montréal. La construction d’une scène sûre pour ces femmes implique l’aménagement d’un espace dans lequel elles sont avant tout reconnues et appréciées en tant qu’artistes. En outre, l’analyse des données recueillies montre que le fait d’être à la fois artiste, femme, immigrante et allophone s’impose comme un quadruple défi. En s’inspirant de la notion d’« espace sûr », ce projet événementiel cherchait des réponses pragmatiques à deux problèmes vécus par les artistes femmes immigrantes allophones : leur sous-représentation dans le milieu artistique professionnel québécois et la langue en tant qu’obstacle à leur l’inclusion. Le Sarau résulte ainsi du travail collectif et de la volonté d’un groupe de femmes artistes, immigrantes et allophones entreprenant une démarche d’émancipation vis-à-vis leur propre invisibilité.
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Cet article dresse le portrait de cinq organisations qui militent pour l’équité en musique au Québec depuis 2017 : MTL Women in Music, Femmes* en Musique, Lotus collective MTL Coop, shesaid.so MTL et le réseau DIG! Différences et inégalités de genre dans la musique au Québec. En s’inscrivant dans la longue lignée des travaux critiques en historiographie féministe, l’article rend compte de la pluralité des mobilisations féministes au-delà des « vagues » #moiaussi qui ont ponctué l’actualité musicale québécoise au cours des cinq dernières années. Dans la seconde partie, les autrices détaillent les travaux du réseau D!G. Elles présentent des retombées initiales prometteuses à la fois pour le milieu universitaire et pour les milieux de pratique en ce qui concerne l’épistémologie et les méthodologies de la « musicologie partenariale collaborative féministe ».
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Certains membres de la scène des musiques nouvelles souhaitent en décentrer ses racines eurocentriques et en critiquer ses tendances colonialistes. Avant même de discuter des stratégies qui pourraient constituer un cadre décolonisateur, il est utile d’identifier comment la colonialité se reflète dans cette scène. L’auteur, lui-même membre actif de celle-ci, partage des pistes de réflexion portant sur l’homogénéité culturelle du milieu, les questions d’accès, l’héritage de la musique classique, le concept de l’excellence européenne, la présomption d’universalité, la coexistence de statuts de légitimité et de marginalité, la relation ambigüe avec l’appropriation culturelle et les fondements de l’attribution du mérite.
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L’oeuvre romanesque de Léonora Miano est profondément marquée par le recours à l’intermédialité. Celle-ci se met en place notamment grâce à des références constantes à une culture musicale qui dépasse l’axe France-Afrique structurant les identités afropéennes des personnages et ouvre l’univers fictionnel sur l’espace atlantique en faisant appel à un patrimoine musical essentiellement américain (jazz, funk, soul, etc.). Au-delà de l’aspect structurel de cette intermédialité musicale, sa présence diégétique renforce par bien des aspects la réflexion – de l’auteure et de ses personnages – d’une part sur les questions identitaires, d’autre part sur la masculinité et la position du « garçon noir » pris en étau entre divers schémas contraignants. Le présent article étudie cette articulation entre intermédialité musicale et identités dans les deux tomes de Crépuscule du tourment.
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Women have been active as performers of instrumental music since the Medieval period, and yet their contributions are often overlooked. This dissertation examines the history of women’s orchestras outside the United States, and explores their development, as well as reasons for existing. Several factors regarding their development are taken into consideration, including time period, country, and culture in which the ensemble is present. The birth of the women’s orchestra is traced from the ospedali of the 18th century Venice to today. All-female ensembles from England, Canada, Cuba, and Afghanistan are profiled, as well as the Women’s Orchestra in Auschwitz. Two modern-day women’s orchestras – the Allegra Chamber Orchestra in Vancouver, British Columbia, and my recital orchestra at the University of Maryland – were surveyed in an attempt to learn more about the culture of women’s orchestras. This paper seeks to answer the questions “What is the culture of women's orchestras today, and should they continue to exist?”
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Blues et féminisme noir explore l’œuvre de deux blueswomen quelque peu oubliées : Gertrude « Ma » Rainey (1886-1939) et Bessie Smith (1894-1937). La première incarne le blues traditionnel, la seconde, le blues classique. Dévalorisée par les spécialistes du blues et du jazz – qui sont en général des hommes blancs –, l’œuvre de ces chanteuses porte un message spécifique : elle affirme la place et les revendications d’autonomie des femmes noires américaines. En analysant et en contextualisant les paroles de leurs chansons, Davis met en évidence les prémices du féminisme noir et les signes avant-coureurs des grandes luttes émancipatrices à venir. Elle montre que Ma Rainey et Bessie Smith furent les premières rock stars de l’histoire de la musique : or elles étaient noires, bisexuelles, fêtardes, indépendantes et bagarreuses. Elles posèrent les bases d’une culture musicale qui prône une sexualité féminine libre et assumée, qui appelle à l’indépendance et à l’autonomie des femmes aux lendemains de la période esclavagiste, en revendiquant avec détermination l’égalité de « race » et de genre. Cette réflexion s’étire aux années 1940 en évoquant l’œuvre de Billie Holiday (1915-1959). Angela Davis réhabilite la conscience sociale de cette chanteuse d’envergure, trop souvent présentée sous le simple prisme des turpitudes de sa biographie. Blues et féminisme noir propose une histoire féministe et politique de la musique noire des années 1920 aux années 1940.
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Dans le domaine de la création musicale au Québec, les compositrices sont toujours moins nombreuses que les compositeurs. Si le métier de compositeur a du mal à être reconnu dans la société québécoise, les compositrices sont doublement marginalisées. Nombre d’entre elles témoignent des défis auxquels elles doivent faire face lorsqu’il est question de s’intégrer au milieu musical, et plusieurs musicologues ont tenté de mieux saisir — pour éventuellement résoudre — les problématiques particulières aux femmes dans le domaine de la composition. Cet article présente une conjonction entre les recherches sur les compositrices québécoises et des ouvrages aux fondements de la musicologie féministe aux États-Unis. Il discute de certaines problématiques communes aux compositrices de musique occidentale de tradition classique, pour finalement observer la fluidité des pratiques de certaines compositrices québécoises, qui inscrivent leurs démarches de création en dehors des « binarismes ». Au fil du temps, les femmes ont été marginalisées au sein des institutions dédiées à la musique de création. Ignorées par les critiques et rejetées par les programmes d’enseignement, elles ont longtemps été en réaction à cette marginalisation. Le rôle des institutions d’enseignement actuelles serait donc d’offrir un enseignement critique du canon musical tel qu’enseigné traditionnellement, pour mieux réintégrer ceux et celles qui en ont été rejetés. Si une ouverture se crée depuis quelques années vers des pratiques plus fluides, un décloisonnement de l’identité de compositrice et de compositeur s’observe déjà chez certaines compositrices qui éloignent leurs pratiques des « binarismes », notamment avec Danielle Palardy Roger, Diane Labrosse et Joane Hétu — pionnières du courant actualiste —, mais aussi avec des compositrices telles que Nicole Lizée et Katia Makdissi-Warren.