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L’imaginaire campagnard associé à la chanson country-western masque une réalité méconnue. Entre 1942, année du premier enregistrement sur disque de Roland Lebrun, et 1958, année de la fondation de la première maison de disques indépendante spécialisée dans la production d’enregistrements country-western, le genre se structure en partie autour de pratiques artistiques et de réseaux urbains. Cet article propose une histoire culturelle de la chanson country-western par l’intermédiaire, notamment, de ses pratiques médiatiques. Au premier plan de cette analyse se trouve la radio, qui, en faisant une place inédite aux amateurs, permet aux premiers chanteurs country-western non seulement de se faire connaître et de se professionnaliser, mais aussi de développer une relation de grande proximité avec le public. Un bref portrait du rôle du studio d’enregistrement et des maisons de disques, qui offrent un revenu stable à ces artistes, révèle un genre largement apprécié. D’un studio à l’autre, Montréal, aux côtés de villes industrielles importantes (Drummondville et Trois-Rivières, par exemple), joue un rôle prédominant. , This paper examines a few aspects of the cultural history of country-western music in Quebec. The rural imagery of the songs, with their cowboys, their farms, their mountains, hides an important phenomenon; at its beginnings, the genre heavily relies on urban networks and urban cultural practices. This is especially important during the structuration of the genre, between 1942, when Roland Lebrun records his first songs, and 1958, when the genre finally has its own independent record companies. During these 16 years, among other strategies, country-western artists use the media to start and promote their careers. Here, the radio plays an important role; with its openness to amateurs, it allows these artists to become professionals and to develop an intimate relationship with their audience. Recording studios provide them with a regular income between touring seasons. From one studio to another, Montreal, as well as important industrial cities of the time (Drummondville, Trois-Rivières), is an important protagonist in the structuration and the dissemination of the new genre, which deeply relies on urbanity and modernity despite the traditional image it tries to project at the same time.
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Cette thèse explore les liens entre le country-western produit au Québec entre 1942 et 1957 et la modernité populaire. À l’aide de l’analyse musicale et de l’histoire, ce travail de recherche tente de cerner la signification culturelle du genre au moment de son émergence. L’histoire du country-western débute au Québec avec le soldat Roland Lebrun, qui amorce en 1942 sa carrière sur disque. Il sera suivi de Paul Brunelle, de Marcel Martel et de Willie Lamothe, qui enregistrent chez l’une ou l’autre des deux compagnies généralistes établies à Montréal pendant les années 1940, Compo et RCA Victor. À mesure que le genre se structure, notamment grâce à la fondation de compagnies de disques spécialisées à partir de 1958, un discours sur l’authenticité du country-western se développe chez les artistes et leurs observateurs. Fondée sur une valorisation a posteriori des conditions qui caractérisent la période d’émergence du genre, qui s’étend de 1942 à 1957, l’authenticité insiste sur la continuité et la tradition. Ce discours, présent dès le milieu des années 1960, masque les aspects les plus modernes d’un genre qui, au moment où il émerge, n’est pas explicitement porteur de valeurs traditionnelles ou conservatrices. La voix country-western constitue un premier indice de modernité. La chanson country-western québécoise des années 1940 et 1950 structure dans un cadre musical des modificateurs paralinguistiques dont les deux plus caractéristiques, d’un point de vue générique, sont la nasalisation et le second mode de phonation. Véhicules de l’expressivité vocale, ces deux modificateurs du timbre sont coordonnés avec les paroles des chansons et avec la variation de paramètres musicaux, technologiques et phonétiques. Ils contribuent à la construction d’èthos spécifiques comme la tristesse, la solitude, la plainte et l’exubérance, et conservent dans le contexte discursif constitué par les enregistrements la signification expressive qu’on leur attribue dans la parole spontanée. C’est donc la voix parlée, quotidienne et ordinaire, qui fournit à l’auditeur le code culturel lui permettant d’en interpréter la signification. En ce sens, la chanson country-western incarne une certaine modernité populaire, redevable au code de la langue vulgaire partagée par le plus grand nombre. La modernité du country-western est aussi apparente dans sa popularité, qui se réalise à la fois dans son succès comme objet de consommation et dans sa proximité avec le public qui en détermine en partie le développement. Son recours particulier à la technologie, qui contribue à la création d’effets de spatialisation mais surtout à la mise en scène de l’intimité, le rattache aussi à la modernité. Enfin, le country-western témoigne d’une américanité certaine, assumée, et s’inscrit dans le déplacement du centre de gravité culturel, de l’Europe vers les États-Unis, qui marque la modernité. L’américanité du country-western, liée à ses origines mêmes, se renouvelle à la fin des années 1950 alors que le genre intègre le rock and roll.